S’inspirant des travaux du Prix Nobel de médecine Otto Warburg, le Docteur Laurent Schwartz analyse les mécanismes cellulaires et leurs dérè­glements. Ses recherches montrent que le développement des tu­meurs passe par un changement du fonctionnement de nos cellules. Cet aspect du cancer, bien qu’il ait fait l’objet de nombreuses études, n’avait encore jamais donné lieu à des traitements. De plus en plus de scientifiques valident cette approche de la compréhension du cancer conduisant à la mise au point de traitements non toxiques.

Le Docteur Laurent Schwartz, 58 ans, est un cancérologue de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) longtemps détaché à l’École Polytechnique où il a créé un groupe pluridisciplinaire. S’y retrouvent, dans le cadre de la collaboration entre l’AP-HP et l’École Polytechnique, des médecins des mathématiciens, des physiciens et des biologistes.

Son travail vise à saisir l’unicité et par là la simplicité du cancer. Pour lui, il n’y a pas des dizaines de cancers différents mais une maladie unique plus ou moins agressive. Pour saisir ce que le cancer a de constant, il exhume les publications du double Prix Nobel Otto Warburg. Pour Warburg, le cancer se résume à un seul phénomène : la baisse du rendement de la cellule cancéreuse. Pour compenser cette baisse de rendement et donc survivre la cellule cancéreuse se doit de capter une quantité accrue de sucre. Le sucre est la base même de la synthèse de nombre de constituants de la cellule cancéreuse. Pour que le cancer cesse de progresser, il suffit d’améliorer le rendement. La cellule cancéreuse brûlera mieux le sucre, cessera de le capter et cessera de grossir.

Les cellules cancéreuses consomment énormément de glucose, et donc en privent les cellules normales, de plus elles pillent l’organisme de ses graisses et de ses protéines, donc de ses muscles. Pour que le cancer arrête de grossir il faut que ces cellules cessent de consommer trop de sucre et qu’elles puissent le brûler. Il faut aussi les empêcher de fabriquer les membranes.

Dans les cellules cancéreuses, il existe une augmentation de l’absorption de glucose (sucre) qui ne peut être dégradé par l’intermédiaire du cycle de Krebs (effet Warburg).  Les flux métaboliques sont alors détournés vers la synthèse de lactate et surtout d’ADN et d’ARN.  Mais il existe une deuxième anomalie qui permet aux cellules tumorales de synthétiser leurs membranes. Elles utilisent les protéines et les lipides de l’organisme pour fabriquer leurs propres acides gras constituant nécessaires de la membrane. Les cellules grossissent et, donc, se divisent.

Les recherches menées depuis plus de vingt ans ont permis d’isoler une combinaison de médicaments qui freinaient la croissance des cancers chez les animaux. Ces deux médicaments de la pharmacopée sont l’acide lipoïque et l’hydroxycitrate.

  • L’Acide Lipoïque qui permet à la cellule tumorale de bruler ce glucose et donc diminue la synthèse d’ADN et d’ARN.
  • L’Hydroxycitrate qui empêche la synthèse des membranes.

Il s’agit de compléments alimentaires qui ont plusieurs dizaines d’années et qui sont dans la pharmacopée européenne.

Nous avons tenté successivement de combiner notre association d’acide lipoïque et d’hydroxycitrate à d’autres médicaments. La combinaison la plus prometteuse actuellement fait appel au bleu de méthylène. Elle fait l’objet des recherches et essais menés dans le cadre du projet THEMA.

En résumé, il s’agit de priver les cellules cancéreuses, et uniquement celles-là, des éléments nécessaires à leur croissance et leur multiplication. C’est une approche différente des chimiothérapies et radiothérapies dont l’objectif est de tuer ces cellules, avec d’inévitables effets sur les cellules normales. Comme ces anomalies métaboliques sont le fait des  seules cellules cancéreuses, le traitement métabolique n’a que peu d’effets secondaires.

 

1 – Otto Heinrich Warburg est né le 8 octobre 1883, à Fribourg-en-Brisgau en Allemagne. Il a étudié la chimie sous la direction d’Emil Fischer, et a obtenu le diplôme de Docteur en chimie à Berlin en 1906. En 1911, il devient docteur en médecine à Heidelberg. Et en 1918, il est nommé professeur à l’Institut Kaiser Wilhelm à Berlin.
En1931, il devient
directeur du département de Physiologie cellulaire de cet institut. O.H. Warburg était avant tout un pionnier dans la création de nouveaux outils de recherche. Il mettra au point de nombreuses méthodes d’analyses spectrophotométriques d’identification des constituants cellulaires et des enzymes, des méthodes manométriques pour l’étude du métabolisme des cellules, et des méthodes pour la purification des constituants cellulaires et pour la cristallisation des enzymes.
Ses travaux sur la caractérisation de l’enzyme responsable de
la respiration cellulaire (aujourd’hui connue comme la cytochrome-oxydase) lui valurent le prix Nobel de Médecine en 1931.
Sa carrière scientifique fut très prolifique et la liste de
l’ensemble de ses découvertes est considérable. O.H. Warburg fut Membre Étranger de la Société royale de Londres (1934) et membre des Académies de Berlin, Halle, Copenhague, Rome, et d’Inde. Il fut décoré de l’Ordre du Mérite de la Grande Croix, et de l’étoile et du ruban d’épaule de la Bundesrepublik. En 1965, il est élu docteur honoris causa à l’Université d’Oxford. Il décède en 1970 à l’âge de 87 ans.